Tour d’horizon de la conjoncture actuelle de la filière viande bovine avec David Moisan et Valentin Gledel, respectivement responsables viande bovine FNSEA 44 et JA 44.
Quelle est la situation actuelle pour les éleveurs allaitants ?
La situation ne s’améliore pas vraiment, malheureusement. Le cheptel allaitant diminue chaque année et on risque de manquer de vaches les années à venir, ce qui posera problème pour l’approvisionnement des abattoirs. Il n’y a pas une filière où les prix couvrent les coûts de production, qui sont aujourd’hui fixés à 5,10€ par l’Interprofession en vache allaitante, et c’est sans compter les grandes hausses qu’il y a eues depuis septembre. Le prix n’étant pas là, la survie de la filière reste menacée en permanence.
Malgré tout, et en lien avec la révision de la loi EGAlim, nous poursuivons les actions pour défendre la filière auprès de nos parlementaires. Mais sans une juste rémunération, principal axe de notre action, c’est l’avenir de la production de viande bovine qui est mis en péril.
Pourtant la conjoncture économique n’est-elle pas plutôt favorable, avec une légère augmentation des prix payés ?
C’est vrai, ce qui rend la stagnation de nos prix encore pire finalement ! L’ensemble des pays européens connaissent de belles embellies au niveau des prix payés, et la France non ! Les abattoirs sont en attente des bêtes, car le cheptel national diminue et les prix sont montés partout en Europe ce qui fait que les vaches françaises, aujourd’hui, sont au même prix que les autres voire un peu moins chères. De fait, on constate une vraie raréfaction du produit, et en dépit même de la loi de l’offre et de la demande, nos prix payés n’augmentent pas. On a l’impression que l’on se moque de nous.
Le ministre de l’Agriculture, Julien Denormandie, a annoncé la contractualisation obligatoire en viande bovine dès janvier 2022. Comment réagissez-vous à ce bouleversement de la filière ?
En effet, dans le cadre de l’application prochaine de la Loi Égalim 2, la contractualisation sera obligatoire en jeunes bovins, génisses et vaches allaitantes dès le 1er janvier 2022. Puis viendront les broutards au 1er juillet 2022 et les vaches laitières au 1er janvier 2023. Dans tous les contrats devront figurer une durée d’engagement, un volume, et un prix avec le détail de constitution : quels indicateurs ont été pris en compte et dans quelles proportions. Cela semble un très grand changement, même si nous manquons encore d'informations sur sa mise en place concrète. Ce qui est sûr, c’est que c’est une arme pour les éleveurs, une arme que nous réclamions depuis longtemps. Et maintenant qu’on va avoir les armes, il va falloir se battre pour aller chercher des prix. La FNB et la FDSEA de Vendée, avec les services animations et juridiques, seront largement mises à contribution, mais ce combat doit être avant tout mené par chaque éleveur. Et ça doit commencer dès maintenant : si les prix ne sont pas corrects, il faut refuser d’envoyer les animaux ! Aujourd’hui, on observe des différences qui vont jusqu’à la dizaine de centimes par kilo de carcasses entre ceux qui bataillent dur et ceux qui laissent partir à tout prix. Ensemble, on est plus forts ! Il est important de se rassembler pour proposer des contrats collectifs.
Delphine Barel