Culture - De l’eau, toujours de l’eau !

Les cumuls de pluie sont tombés cette semaine sur des sols qui n’en avaient déjà pas besoin. Les rendements des céréales vont certainement en pâtir et les prairies semées après une récolte de maïs compliquée et tardive posent question. Témoignages.

Depuis l’automne 2023, les agriculteurs doivent composer avec les excès d’eau plus ou moins longs. Depuis Noël dernier, certaines parcelles ont du mal à absorber le trop-plein et les tempêtes de cette semaine n’ont pas arrangé la situation. Dans le nord du département, les inondations vont certainement compromettre les récoltes. Le sort des céréales sera variable suivant la date des semis et dépendra surtout de la capacité de l’eau à s’évacuer en quelques jours.

Voici des témoignages d’agriculteurs dans le département.

  Nicolas Coudriau, éleveur laitier à Sainte-Lumine-de-Coutais  

« Dimanche et lundi, on a encore eu 25 mm de pluie et autant les deux jours suivants. C’est très humide dans les champs. Je n’ai pas fini les maïs, il m’en reste 3 ha sur les 80 ha semés mais je pense que c’est cuit. Déjà, on a ramassé les autres comme on a pu, assez verts, en laissant 15 ha en maïs grain. Pour ces 3 ha restants, je pense que je vais voir avec l’assurance.

J’avais semé de la prairie, 50 ha sur 80 ha fin décembre, mais j’ai beaucoup d’inquiétudes sur le résultat, tout est en mauvais état. Reprendre derrière des sols qui ont été massacrés lors des récoltes, c’est difficile ! Il ne faudrait pas de pluie pendant un mois et demi… C’était déjà très compliqué d’aller dans les champs avec les batteuses avant les pluies de cette semaine mais là, c’est impossible. L’épandage aussi, c’est compliqué, tout est plein. Je fais aussi 5 ha de blé. Il avait commencé à lever mais avec toute cette eau, je ne préfère même pas aller voir ! Actuellement, tout le monde en a marre, ce n’est pas très motivant de travailler dans ces conditions ». 

  Maxime Legendre, éleveur laitier et céréalier à Moisdon-la-Rivière  

« C’est encore très compliqué cette année, ça ressemble à l’année dernière. Depuis le début du mois de janvier, on cumule 200 mm de pluie. On avait réussi à semer la totalité des céréales prévue, fin octobre, début novembre. Dans les zones où les conditions de semis étaient compliquées, ça semble compromis. Pour les autres parcelles, on pensait que ça pouvait repartir mais avec les quantités d’eau, ça ne va pas faciliter les choses. Aujourd’hui, on a de l’eau sur tous les terrains, il faudrait du beau un moment pour retrouver de la portance. En plus, ce sont des zones dans les parcelles, pas forcément la parcelle en entier, ce qui fait que c’est compliqué de modifier l’assolement. Normalement, début février, on aurait dû apporter de l’engrais pour rebooster les céréales mais il sera impossible d’entrer dans les parcelles. Il faudra encore attendre et, même si ce n’est pas perdu, le rendement va diminuer. Pour les prairies, on n’avait pas pu ramasser le maïs de bonne heure, ce qui complique le ray-grass après. On ne sait pas ce que ça va donner. Pour les prairies semées après les céréales, ça devrait aller. C’est du jamais vu, ça s’enchaîne depuis l’automne 2023. On doit s’adapter, on n’a pas le choix »

  Rodolphe Landais et Lydie Sebilo, éleveurs de bovins allaitants parthenaises, à Herbignac  

« On est sur la même lancée que 2024. On ne peut pas mettre les pieds dans le marais de Brière depuis octobre 2024. Pas une vache n’est sortie, on n’a quasiment rien récolté. Les terres labourables sont sous l’eau. On a récolté que 39 tonnes de maïs grain humide sur 11 ha, au lieu de 120 tonnes habituellement. On a eu des dégâts de sangliers (3 ha mangés sur 14 ha) et avec la tempête en novembre, le vent s’est engouffré là où ils étaient passés, a tourbillonné et beaucoup de maïs a été perdu. C’est dommage car on bénéficie d’eau gratuite pour irriguer avec la laiterie d’Herbignac. Aujourd’hui, on n’a toujours pas semé les prairies. On a 14 ha à faire. Semer au printemps, ce n’est pas top mais on n’a pas le choix. Sur l’alimentation des vaches, ça va être juste mais ça va faire la maille. On a acheté du foin qui n’est pas de grande qualité mais il y en aura assez. 

L’autre moitié de mes terres est en marais. Et là, la catastrophe vient de la mauvaise gestion des élus politiques. On voit bien que le loisir prend le dessus sur l’agriculture. Ma femme s’est installée et si ça continue comme ça, cela compromet son installation. Le niveau d’eau qui sera voté décidera de notre avenir. En plus, dans nos prés labourés, on a des cours d’eau qui ne sont pas curés par les collectivités. Avec les dernières pluies, ça déborde sur les routes ! 

2024 était une année exceptionnelle mais si le climat continue dans ce sens, on va revoir notre système. On passera tout en herbage et on achètera le maïs. C’est trop de stress pour récolter quoi au bout ? On va s’adapter au climat, on n’a pas le choix mais il faut rester viable économiquement. Si on n’a plus d’animaux dans le marais, ce sera une friche ».  

Propos recueillis par Delphine Cordaz